Comme dit précédemment, nous avons une fille, âgée aujourd'hui de 6 ans.
Avec nous, elle a particulièrement vécu les deux derniers deuils péri-nataux ; nous lui avons épargné dans la mesure du possible les fausses-couches. Du haut de son mètre, elle ressent une certaine injustice... Elle a attendu d'être grande soeur, elle a espéré et ne l'a jamais véritablement été ; contrairement à ses copains qui sont pour la plupart frère ou soeur...
Elle a pu clamer sa douleur lors de la perte d'Angeline, elle avait alors 4 ans... Nous venions de lui annoncer que le bébé qu'Anne portait était mort in-utero.
Dans des larmes elle nous répondit : "J'en ai marre, eux [en faisant référence à nos enfants décédés] ils peuvent jouer ensemble tous les 3 au ciel et moi je suis là toute seule..." Que de douleur exprimée...
Lors du RV avec la psychologue du Conseil Général pour l'agrément, elle a un échange très explicite...
- Tu sais pourquoi je suis là ?
- Oui, pour l'adopté.
- C'est qui l'adopté ?
- C'est mon petit f frère ou ma petite soeur, mais je préfère une petite soeur... Eux ils ne mourront pas dans le ventre de maman..."
Donc pour elle, l'adoption est avant tout chemin vers un frère ou une soeur vivant...
Sur ce chemin de l'adoption, elle a compris que des enfants étaient abandonnés, donc que les enfants pouvaient être potentiellement "abandonnables"... Il a fallu la rassurer, lui faire comprendre pourquoi elle, elle ne serait pas 'abandonnable' ; que nous serions toujours là et lui expliquer également qui pourrait s'occuper d'elle si nous venions à mourir...
Ne sachant pas si notre chemin va aboutir (un peu moins des procèdures d'adoption abourissent...) on l'a bien mise en garde... D'une manière un peu caricaturale, on lui dit qu'on ne va pas tuer des parents pour avoir un enfant... Elle en convient, même si elle désire un petit frère ou une petite soeur...
On lui dit juste que si un enfant a des besoins auxquels nous pouvons répondre et s'il croise notre route, nous sommes prêts à l'accueillir. C'est une manière pour nous de lui faire comprendre que l'adoption répond d'abord aux besoins de l'enfant adopté et non à nos désirs...
.Le temps n'est pas simple à gérer également... Nous lui avons dit que ce ne serait pas avant son CM1... Cela lui permet d'avoir un repère dans le temps...
Elle a hâte de lui apprendre des choses, de lui montrer, de lui expliquer ou tout simplement d'avoir un compagnon de jeu... Elle ne mesure pas du tout ce que ça changera pour elle qui perdra son statut d'enfant unique....
A ce jour, elle a rencontré plusieurs enfants adoptés. Elle est parfois curieuse de leur histoire mais nous lui avons expliqué que cette histoire appartient à ces enfants et c'est à eux seuls de partager si ils le souhaitent... Pas simple pour elle de gérer sa curiosité... Elle a pu aussi échanger avec Louise, elle même enfant biologique, qui a accueilli son petit frère adopté... Elle a posé des questions sur le regard des autres enfants quant à la différence de peau, sur le voyage...
Elle absorbe aussi nos attentes, nos espoirs, nos contrariétés de ce projet... Avec nous elle chemine, nous demande parfois où ça en est... Avec elle, nous avons hâte de fêter notre accord de l'ICAB...
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